lundi 4 mars 2013

l'espace entre l'espace et moi

oldchum
j'ai fait ma première crise d'angoisse à quatre ans et demie
après avoir écouté Découverte à Radio-Canada en famille
tradition oblige

ça parlait des infinis
infiniment petit
infiniment grand
Tysseyre disait que j'étais des cellules
pis tout de suite après il me montrait des galaxies qui existent peut-être pour vrai
vertige

après l'émission
dans mon lit de moi de quatre ans et demie
c'était l'avènement des premières insomnies
je comptais le nombre d'enfants de quatre ans et demie sur la tapisserie qui faisait le tour de mon univers pas infini du tout
je comptais tout
surtout ce qui était difficile à compter
combien de cheveux j'ai
combien de poil dans mon tapis
combien de petits reliefs sur le mur de gyproc
combien de secondes je peux arrêter de respirer
compter parce que ça m'empêchait de me rappeler que j'étais faite de galaxies infiniment invisibles

la faute à Tysseyre
si j'ai compris la vastitude de l'intimité entre moi et moi
ma chambre de quatre ans et demie n'étais plus refuge
elle était vertige
insondable

même pas une main d'années de vie
et voilà semées en moi les ambiguïtés nécessaires
qui se sont crues chez elles
dans la fertilité de mon innocence
et qui ont crû jusqu'à croître plus vite que moi
par en dessous par derrière
comme jack et le haricot
ma colonne s'est envenimée sous le poids des affaires impossibles à compter
toute croche j'ai poussé pas haut haut
mais j'ai poussé des cris la nuit très forts
quand j'avais encore le droit de crier la nuit

astheure que j'ai deux fois deux mains de vie
le cri se perd en moi comme il se perdrait dans l'espace de Tysseyre
y a pas d'écho je pense dans les galaxies
dans mes cellules non plus
je crie fort
et aucune paroi ne veut de moi

Aucun commentaire: